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Le racisme d’Etat en marche en Tunisie

Qui aurait cru que la plus haute autorité de l’Etat en Tunisie allait succomber au courant d’opinion xénophobe aux relents racistes qui se développe actuellement dans la société tunisienne imputant tous les malheurs du pays aux émigrés africains subsahariens ?

Par Imed Bahri

Faisant écho à une campagne médiatique menée par ses partisans sur les réseaux sociaux contre la présence d’émigrés subsahariens en Tunisie, le président Kaïs Saïed en a repris lui-même tous les arguments lors d’une réunion du Conseil national de sécurité organisée à cet effet, mardi 21 février 2023 au palais de Carthage.

Lors de cette réunion, le président de la république a souligné la nécessité de prendre des mesures d’urgence pour faire face rapidement au phénomène d’arrivée massive de migrants irréguliers d’Afrique subsaharienne en Tunisie.

Emigration ou «arrangement criminel»

Le chef de l’Etat a relevé que cette situation est «anormale», d’autant plus que l’arrivée de vagues successives de migrants irréguliers en provenance d’Afrique subsaharienne se poursuit, et s’accompagne de violences, de crimes et de pratiques «inacceptables», en plus d’être criminalisée par la loi.

Saïed a appelé à des actions à tous les niveaux diplomatiques, sécuritaires et militaires, et à une application stricte de la loi relative au statut des étrangers en Tunisie et au franchissement illégal de la frontière. Il a estimé que les responsables de ce phénomène «font de la traite des êtres humains, tout en se réclamant de la défense des droits de l’homme».

Sacrifiant à son habituelle théorie complotiste, Saïed a affirmé qu’il existe un «arrangement criminel conclu depuis le début de ce siècle pour modifier la structure démographique de la Tunisie» (sic !). Il y a des parties qui ont reçu d’importantes sommes d’argent après 2011 pour installer des migrants irréguliers d’Afrique subsaharienne en Tunisie, a-t-il ajouté, reprenant ainsi des allégations ayant fleuri ces derniers temps dans les réseaux sociaux, sans citer nommément ces parties ni apporter la moindre preuve matérielle de l’existence d’un tel «arrangement criminel».

Sacrifiant à une forme de racisme décomplexé et assumé par les plus hautes sphères de l’Etat, le président Saïed a ajouté que «le but caché derrière ces vagues successives de migration irrégulière est de faire de la Tunisie un pays africain, sans aucune affiliation aux nations arabes et islamiques».

Haro sur l’étranger !

Comme pour se rattraper et atténuer le choc pouvant être provoqué par ses propos, Saïed a, d’autre part, souligné que la Tunisie est fière de son appartenance africaine, car elle est l’un des pays fondateurs de l’Organisation de l’unité africaine, et a soutenu de nombreux peuples dans leur lutte pour la libération et l’indépendance. Tout en appelant à ce que l’Afrique soit aux Africains afin de mettre fin aux guerres et aux famines subies par les peuples africains depuis des décennies.

Avant cette prise de parole du président sur cette question, qui risque de faire des vagues sur le plan diplomatique, l’ancien ambassadeur Elyes Kasri avait, dans un article publié hier dans Kapitalis, averti contre «un courant d’opinion xénophobe… aux relents se rapprochant dangereusement du racisme», qui se développe en Tunisie.

Revenu aujourd’hui au même sujet dans un post Facebook, le diplomate a relevé «les similitudes entre de nombreuses opinions exprimées en Tunisie, sans choquer grand monde, sur la situation des ressortissants subsahariens sur le sol tunisien et les positions du Front national français, communément considéré comme un parti sulfureux d’extrême droite, xénophobe et raciste».

«Comme quoi, dans cette ère d’intensification de la mobilité des populations, phénomène qui n’épargne aucun peuple, chaque société a ses adeptes de Jean-Marie Le Pen qui sommeillent douillettement à l’affût du moindre étranger en situation de précarité pour lui imputer tous les sombres desseins et malheurs du monde», a ajouté le diplomate, ne se doutant pas que la présidence de la république allait elle-même succomber à cette dérive qu’il faut bien qualifier de raciste.

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