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‘‘Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine’’: l’assujettissement d’une superpuissance

Les intérêts des Etats-Unis d’Amérique coïncident-ils toujours avec ceux d’Israël? Certainement si l’on s’en réfère au soutien inconditionnel apporté par la plus grande puissance du monde à l’État juif. Pourtant ce jugement devrait être significativement nuancé. (Illustration : Netanyahou chuchote dans l’oreille de Biden : devinez qui est le patron ?)

Par Dr Mounir Hanablia *

Il n’est en effet pas rare que les Américains se soient engagés dans des entreprises politiques ou même militaires au bénéfice de leur allié sans aucun intérêt évident pour leur propre pays.

Incohérences de la politique américaine

En 2003 l’Irak subit l’invasion américaine. Nul n’en connaît encore aujourd’hui la raison. Pays soumis alors depuis 11 ans à un embargo inhumain, même sur les médicaments, son régime politique était moribond, mais il constituait toutefois un contrepoids non négligeable à l’influence iranienne.

Une histoire montée de toutes pièces, celle des armes de destruction massive, allait précipiter les envahisseurs dans un bourbier dont ils ne sortiraient qu’au prix de pertes humaines et matérielles sans commune mesure avec les bénéfices engrangés.

L’Amérique n’aura rien gagné à envahir l’Irak, puisque ce pays s’est retrouvé en grande partie dans l’orbite iranienne. 

La Syrie est un autre exemple de l’incohérence de la politique américaine. Le clan Assad a toujours été prêt à faire la paix avec l’Etat sioniste moyennant la restitution du Golan et le retrait de son soutien au Hezbollah et au Hamas. Pourtant les Etats-Unis l’ont toujours situé dans leur «axe du mal» et ont invariablement refusé ses ouvertures alors qu’il aurait pu jouer un rôle pacificateur important en Irak.

Le Liban constitue une démonstration supplémentaire de l’effilochage de l’influence américaine dans la région. Le soutien militaire sans faille accordé à Israël en 2006 a abouti à une destruction durable de l’infrastructure du pays grâce aux bombes à fragmentation américaines interdites par les lois internationales, et à fort ressentiment anti-américain dans la population, alors que la consolidation du gouvernement libanais pour contrecarrer l’influence du Hezbollah était l’un des objectifs de la diplomatie américaine.

La conséquence de cette politique moyen-orientale américaine a été la constitution de l’Etat Islamique de sinistre mémoire, et surtout celle d’un axe Iran-Syrie-Hezbollah- Hamas-Houthis dont la crise actuelle à Gaza démontre qu’il ne puisse plus être marginalisé.

Avec le développement du programme nucléaire Iranien qu’Israël considère comme une menace existentielle, les Etats-Unis ont installé des bases militaires en Irak et en Syrie, qui ont fait l’objet d’attaques et de représailles aux bombardements terroristes actuels  de Gaza par l’armée israélienne et à l’appui militaire et diplomatique américains.

Alors que les intérêts stratégiques des Américains ne sont nullement menacés au Moyen-Orient, cette politique de «double containment» menée vis-à-vis de l’Irak et de l’Iran leur cause d’autant plus de tort, qu’il est désormais avéré qu’elle n’assure pas l’objectif qu’elle prétend poursuivre, la protection de l’Etat d’Israël. De surcroît, la majorité de la population américaine y est hostile. 

Le lobby pro-israélien dicte sa loi

Les différentes administrations américaines ont continué de pratiquer une politique de soutien inconditionnel aux exigences israéliennes, contraire à leurs propres intérêts nationaux, et ce sont évidemment les groupes de pression sionistes qui en sont responsables.

Il faut à cet effet éviter de parler de lobby juif. En effet, la majorité de la population juive américaine plus encore que le reste du pays s’est opposée aux guerres au Vietnam et en Irak. De surcroît le lobby pro-israélien est aussi constitué par les chrétiens sionistes  dont le rôle n’est pas négligeable dans la colonisation des territoires occupés.

Nul n’ignore les capacités d’intervention du lobby par le biais du soutien électoral au Congrès, à la Maison Blanche, mais aussi son poids dans les médias, pour influencer l’opinion publique en faveur des thèses israéliennes les plus contestables.

L’accusation d’antisémitisme est évidemment la panacée grâce à laquelle tout débat public est interdit non seulement sur le soutien militaire et financier américain en faveur de l’Etat Juif, mais sur sa propre politique de colonisation intensive, d’occupation militaire, et de répression contre le peuple palestinien, ainsi que de négation de ses droits nationaux.

Quant à la déshumanisation de ses adversaires, elle est systématique, digne de celle des Nazis. Après le Hezbollah accusé en 2006 de se servir de la population comme boucliers humains, c’est maintenant le Hamas qui fait l’objet de la même propagande.

Naturellement la prochaine phagocytose de Gaza par l’Etat juif ne déclenchera que des protestations verbales de la part de l’actuelle administration américaine, et les 15.000 civils tués (le chiffre n’est pas définitif) dans les bombardements passeront bientôt par pertes et profits.

Israël mène l’Occident vers le marigot

L’influence du lobby israélien américain semble s’étendre en direction l’Europe de l’Ouest, où l’alliance nazie-sioniste parle de Reconquête (inspirée de la Reconquista espagnole) et d’interdiction du regroupement familial pour les immigrés musulmans. La politique d’apartheid pratiquée en Israël contre les Arabes deviendra la norme en Occident. Mais lobby ou pas, la récente guerre de conquête à Gaza a démontré que la soumission des Etats arabes au diktat israélien dans le cadre des accords d’Abraham n’a ni réglé la question palestinienne, ni apporté la paix et la sécurité à Israël, ni encore moins diminué les contraintes imposées par un soutien sans réserve à l’Etat sioniste, plus que jamais dépendant de l’aide américaine.

En 1953, les Israéliens avaient tenté d’occuper les sources du Yarmouk, le président Eisenhower avait réagi et Ben Gourion, qu’on ne peut qualifier de mou, avait reculé devant la menace de se voir privé de l’aide militaire et financière. Mais ces temps sont révolus. Les premiers ministres israéliens ont pris l’habitude de dicter leurs volontés aux présidents américains sans craindre de mesures de représailles, et ces derniers ont appris à s’en accommoder. Et tous ceux qui dans le monde arabe tablent sur un revirement de la politique américaine sur le court ou le moyen terme pour résoudre le conflit palestinien se bercent d’illusions. Le lobby sioniste, c’est désormais le joueur de flûte de Hamelin qui mène la totalité du monde occidental vers le marigot.   

* Médecin de libre pratique.

‘‘Le lobby pro-israélien e la politique étrangère américaine’’, de John J. Mearsheimer & Stephen M. Walt, éd. La Découverte, Paris, traduit de l’anglais par Nadia Marzouki, 22 janvier 2009, 504 pages.

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