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Présidents américains : Le bon, la brute, le truand

Devenir président des Etats-Unis reste une option captivante; des candidats d’horizons divers ont réussi à accéder à la charge suprême de l’Etat. Le pays s’est imposé au fil des années comme un interlocuteur international incontournable. La Maison blanche est devenue ainsi un devoir, une cible de choix et son bureau ovale un objet de convoitise. Mais la lassitude démocratique gagne des pans entiers de la société américaine, qui succombe, elle aussi, aux sirènes du populisme.

Par Mohsen Redissi *

Assumer pleinement la tâche et partir sans éclaboussures est un examen que peu de présidents ont réussi à franchir. Le jeu d’alliance, l’exigence d’allégeance et le désir de rester au sommet poussent un grand nombre à tomber dans l’excès. La charge de la présidence semble avoir une incidence sur le mental, une entreprise dont les contours ont été définis au fur et à mesure par la personnalité du chef d’Etat. 

Grandeur…

Seul le général Georges Washington, 1er président (1789-1797), a brigué, sans difficulté aucune, deux mandats consécutifs et a été élu à l’unanimité sans avoir d’opposants par respect à sa contribution dans la guerre d’indépendance. Un personnage à part : l’Amérique entière célèbre chaque année sa naissance, le Presidents’ Day ou le Washington’s Birthday, toujours le troisième lundi de février depuis 1879.

Un président élu foudroyé, William Henry Harrison, 9e président (1841), a péché par excès de zèle. Victime d’un orgueil surdimensionné. Le jour de son investiture, il a tenu un discours d’une heure sous une pluie battante, faisant fi des conseils de son entourage. Il meurt, un mois plus tard, d’une inflammation aiguë des poumons, une pleurésie d’après la version officielle de son décès.

L’élection d’Abraham Lincoln, 16e président (1861-1865), a été considérée comme une provocation par le Sud esclavagiste. Son Emancipation Proclamation de 1863 a marqué le début des troubles et de l’insécurité. Lincoln comptait octroyer le droit de vote aux nouveaux affranchis. Les États esclavagistes, mécontents, se désolidarisent de l’Union. La guerre de sécession éclate: les fédérés du Nord anti-esclavagiste et les Confédérés du Sud esclavagiste. Lincoln, qui se croit hors d’atteinte, reçoit une balle dans la nuque en pleine représentation d’une pièce de théâtre.

Mécontent de la politique que mène son successeur, Théodore Roosevelt, 26e président (1901-1909), après avoir brigué deux mandats consécutifs, se lance en 1912 dans une nouvelle campagne. Touché par balle en plein discours, il reste stoïque et continue son meeting électoral en réclamant la clémence de la foule envers son assassin.

L’handicap physique de Franklin Delano Roosevelt, 32e président (1933-1945), est un atout qui ne l’a pas empêché d’être élu à quatre reprises dans des temps difficiles. En public, une cane lui est d’un grand secours pour se déplacer, en privé il se déplace en chaise roulante. Assis, il voit où les gens veulent en venir.

Général en chef du commandement allié en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale, Dwight D. Eisenhower, 34e président (1953-1961), ne peut rester les bras croisés quand neuf élèves afro-américains se voient refuser l’entrée en classe dans un lycée de Little Rock. Il n’hésite pas à dépêcher 1000 hommes en Arkansas pour faire respecter l’arrêt de la Cour suprême, Brown v. Board of Education, déclarant la ségrégation scolaire illégale.

La dépouille mortelle de John Fitzgerald Kennedy, JFK, 35e président (1961-1963), gisait dans la soute de l’avion qui le ramenait de Dallas à Washington, D.C. Son successeur direct selon la Constitution, vice-président, Lyndon B. Johnson, LBJ, prêtait serment devant un juge dans la carlingue de l’avion en présence de sa veuve Jacqueline. Pas de sentimentalisme; pour LBJ, 36e président (1963-1969), les affaires de l’Etat ne doivent jamais souffrir de vacance dans les temps difficiles. LBJ imposait sa personnalité et ses choix, éléments essentiels dans la gestion des affaires de l’Etat.

Surfant sur la vague de la visite effectuée par Anouar Sadate à Jérusalem et son discours devant la Knesset, le président Jimmy Carter, 39e président (1977-1981), a proposé sa médiation qui a conduit à la signature du premier traité de paix entre l’Egypte et Israël avec échange d’ambassadeurs. L’assaut d’étudiants iraniens sur l’ambassade américaine de Téhéran et la prise d’otages ont coûté à Carter son deuxième mandat, mais pas le prix Nobel de la paix qu’il a reçu en 2002.

L’accès aux soins pose problème aux Etats-Unis pour des couches de la population. Barack Obama, 44e président (2009-2017), ressent le désarroi des défavorisés, lui l’homme de couleur. L’Obamacare, sa nouvelle réforme, est la protection sociale des déshérités. Hélas, son successeur Donald Trump, 45e (2017-2021), s’empresse de révoquer en grande pompe le service des démunis et mène une politique populiste qui ne craint pas les excès.

… et décadence

La vie d’un Américain moyen compte beaucoup pour le président. Des jeunes, désœuvrés, s’engagent souvent dans l’armée pour avoir le gîte et le couvert et une couverture sociale en attendant des jours meilleurs. Obama signe le désengagement des troupes américaines des zones de conflits en réduisant l’effectif militaire en Irak. Désormais, la mission des troupes américaines est d’entraîner l’armée irakienne, de protéger le personnel américain et de lutter contre le terrorisme.  Il représente les deux faces de la médaille, l’ombre et la lumière.

Joe Biden, 46e président (2021-…), est impliqué dans un imbroglio économico-politique. Comme vice-président, il a usé de son influence en faveur de son fils Hunter; et en tant que président, il est poursuivi pour négligence. Il n’a pas appliqué correctement le protocole de sécurité; des documents classés confidentiels sont jetés dans les oubliettes de sa résidence secondaire et dans son ancien bureau à l’université de Pennsylvanie. Une violation flagrante du code de conduite. 

Dans sa course à la Maison blanche, Joe Biden a promis de faire de son gouvernement la réplique exacte d’une Amérique tolérante, multiraciale et multiculturelle. Pour la première fois un Afro-américain à la tête du département de la Défense, une Afro-américaine à la Cour suprême et un transgenre comme secrétaire adjointe à la Santé, premier cas dans l’histoire de l’administration américaine. Mais son engagement inconditionnel auprès d’Israël, dans le génocide qu’elle perpètre dans la bande de Gaza depuis octobre dernier ne fait pas l’unanimité, y compris parmi son propre camp.

Candidat à sa propre succession mais rattrapé par l’âge, l’actuel locataire de la Maison Blanche est donné par la plupart des sondages perdant des prochaines présidentielles, prévues en novembre prochain face à son prédécesseur, donné vainqueur par ces mêmes sondages.

Le retour annoncé du tonitruant homme d’affaires fait  déjà douter de la pérennité de la démocratie américaine, qui, avec lui, risque de déraper dangereusement. Inutile de dire que l’élection annoncée de Trump fait déjà grincer des dents et craindre le pire, et pas seulement aux Etats-Unis.  

* Haut fonctionnaire à la retraite.

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